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Mise en ligne : 02-05-2008 Mise à jour le 14-01-2016 Lagriurbanisme : une spécialité professionnelle à construire
Loin de régresser comme on limaginait il y a quelques années avec la fin de lexode rural, létalement urbain se poursuit sur le territoire français, comme dans bien dautres pays. Il tend maintenant à se généraliser en concernant, non plus seulement les grandes métropoles, mais de plus en plus les bourgs et les villages. Si les motivations sont encore souvent dordre financier, du fait que les terrains à bâtir y sont moins chers, la recherche dun environnement résidentiel de qualité tient une place de plus en plus grande.
Lexode rural a en effet cédé la place à un «exode urbain», et les nouveaux habitants du monde rural sont maintenant des citadins que laccroissement de la mobilité amène à sinstaller de plus en plus loin des centres urbains. Au rêve pavillonnaire, associé à un désir de propriété privée, sajoute aujourdhui un désir de campagne, considérée dès lors comme un bien commun.
Mais cette campagne est dabord le territoire de lagriculture, construit et entretenu avec ses logiques sociales, techniques et économiques propres. Et au-delà du simple partage des plus-values foncières, la rencontre entre ces nouveaux espaces urbains et le monde agricole se fait le plus souvent dans une ignorance réciproque.
La ville, en sétendant dans le monde rural, apporte avec elle le regard que le citadin porte sur des paysages agricoles quil voudrait voir correspondre à son désir de campagne, souvent nourri dimages obsolètes. Faire de lagriculteur le plasticien de lenvironnement chargé de composer le paysage champêtre répondant à ce désir, comme on le fait pour un jardin dagrément, savère rapidement être une utopie : si lagriculture peut en partie répondre aux attentes citadines, en réinventant par exemple le maraîchage périurbain, ces réponses ne peuvent pas être économiquement viables au-delà de quelques réalisations ponctuelles. Or la réalisation de tels projets demande la mise en uvre de compétences qui sont actuellement dispersées dans des filières pédagogiques dont la structuration actuelle de lenseignement ne facilite pas le rapprochement. Cest à corriger cette dispersion que sattache le collectif «agriurbanisme et projet de territoire», à travers des ateliers communs associant des élèves et enseignants dune école dagronomie (Agroparistech), dune école darchitecture (ENSA de Versailles) et dune école de paysage (ENSP de Versailles). Collectif Si notre groupe a choisi de sintituler "collectif", cest précisément pour marquer labsence de toute hiérarchie dans la logique même de son fonctionnement. Nous affirmons la nécessité dune multidisciplinarité qui veut dépasser ladoption de disciplines connexes par une discipline principale tout en évitant l'écueil de la simple juxtaposition de compétences souvent observée dans des équipes dites "pluridisciplinaires". Enseignement Lobjectif premier du CERAPT est de faire émerger une nouvelle figure professionnelle, que nous avons choisi de nommer "agriurbaniste" et qui doit être capable de répondre à lensemble des attentes formulées par les acteurs de territoires agriurbains dans leur projet. Laxe principal du collectif relève donc de linnovation pédagogique ; son action première consiste à faire se rencontrer des filières pédagogiques aussi éloignées, par exemple, que larchitecture et lagronomie, en mettant en place des formations complémentaires et des enseignements mutualisés. Celle-ci a débuté en octobre 2007 par des échanges denseignants entre une école dagronomie (AgroParisTech), une école de paysage (lENSP de Versailles) et une école darchitecture (lENSA de Versailles). Elle s'est poursuivie à partir de la rentrée 2008 avec la mutualisation dune partie du programme pédagogique de chacun des trois établissements, et en sappuyant sur un terrain commun, choisi en accord avec une des agences de la Région Ile-de-France (voir travaux d'élèves).
Linnovation pédagogique ne pouvant se faire dans les stricts cadres académiques déjà institués, elle doit nécessairement sappuyer sur un travail de recherche spécifique. Celui-ci est engagé, en matière dagriculture urbaine, par plusieurs des membres du collectif depuis plus de dix ans. Il se renforce aujourdhui par des actions de recherche appliquée auxquelles des élèves de troisième cycle sont invités à participer (mémoires de master, thèses de doctorat). Il se manifeste aussi :
Agriurbanisme Ce néologisme veut désigner une thématique nouvelle qui comporte à la fois une dimension pédagogique, une dimension de recherche et une dimension professionnelle. Elle est née dune longue observation de terrain qui a mis en évidence le fait que les problèmes posés par les projets de territoire agriurbain ne trouvaient de réponse satisfaisante dans aucune des disciplines existantes. Le terme est employé pour la première fois par André Fleury en 2000, à loccasion des Entretiens du Pradel ("Autour dOlivier de Serre", 28-30 septembre 2000), publiés en 2001 dans les Comptes-rendus de lAcadémie dAgriculture de France (voir le résumé). Projets de Territoire La notion dagriculture urbaine, telle que nous lutilisons ici, est définie clairement depuis la publication par André Fleury et Pierre Donadieu de larticle intitulé "De lagriculture périurbaine à lagriculture urbaine" (Courrier de lenvironnement n° 31, 1997, voir l'article). La locution a été imaginée pour désigner une agriculture de jardins familiaux implantés par des citadins dans les délaissés urbains ou en périphérie immédiate de la ville, dans les pays du Sud. Dans les pays du Nord, léquivalent se retrouve dans les jardins familiaux inventés en Angleterre à la fin du 18e siècle et repris en Europe continentale au 19e siècle. Leur objectif est essentiellement dapprovisionner la famille, même si il peut y avoir vente de surplus. Elle a été reprise dans larticle précité, puis dans RUAF magazine après 2003, pour rendre compte de limplication croissante de lagriculture périurbaine dans le projet urbain comme le manifestent PURPLE en Europe, Terres en Villes en France et la planification francilienne. Elle comporte des aspects très divers selon que lon sintéresse aux nouvelles filières de production (vente directe ou circuits courts), aux différentes formes de diversification quelle induit (loisir, agritourisme, fermes pédagogiques, accueil dactivités à la ferme), aux aménités paysagères quelle propose aux citadins (les "campagnes urbaines"). Le CERAPT sintéresse à intégrer cette diversité afin de construire la participation de lagriculture aux projets de territoires. Ce dernier point de vue soutient la définition que nous voulons donner de lagriurbanisme en fixant létendue de sa multidisciplinarité.
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